Posts tagged ‘Cap Vert’

Caminhos

Jean-Luc Billet Photographies

Littoral nord de Santo Antão – Cap Vert – novembre 2017

Le réseau de sentiers qui irrigue l’île de Santo Antão est un véritable chef-d’œuvre, que l’on peut rapprocher des levadas de Madère. Vu la complexité du relief et les dénivelés importants, il représente un travail titanesque. Des générations d’esclaves y ont probablement laissé leur sueur et, pour certains, leur vie à l’époque de la colonisation portugaise. Encore aujourd’hui, les routes que peuvent emprunter les quelques véhicules sont rares et ces sentiers restent le seul moyen d’accès à certains villages, habitations isolées et cultures. Les terrasses cultivées vont parfois se nicher à des hauteurs improbables et seuls les ânes et les mules peuvent venir en aide aux hommes pour les exploiter. Le fond des cirques qui ferment les vallées ressemble souvent à un mur de 1000 m de haut, apparemment infranchissable. Et pourtant on y trouve un sentier confortable et impeccablement dallé qui s’insinue dans les failles, passe de vire en vire, escalade des pitons rocheux et propose au marcheur un parcours aérien. Longeant la côte au nord de l’île, un sentier large, souvent bordé d’un mur de pierres sèches, épouse les méandres des falaises, se faufile dans le fond d’un canyon saturé d’embruns (photo ci-dessus) pour croiser la trace d’une cascade à sec, puis remonte par des vires vertigineuses pour laisser le regard plonger à la verticale vers les vagues atlantiques.

Morna

Mindelo - São Vicente - décembre 2017

Mindelo – São Vicente – Cap Vert – décembre 2017

A Mindelo la musique est partout, tout le temps.  Ses habitants disent même que pour dix Mindelenses, il y a onze musiciens. Cesaria Evora, la diva, est jouée et rejouée jusqu’à plus soif, mais la musique vivante est aussi présente partout à travers les groupes qui se produisent chaque jour, en tous lieux et toutes circonstances.

Dans un minuscule atelier discret, à l’écart de l’agitation du centre-ville, l’œuvre du célèbre luthier cap-verdien Mestre Batista se poursuit par les mains de plusieurs de ses fils. Ils fabriquent ici, pour les plus grands musiciens du pays, violons, guitares et cavaquinhos, la petite guitare à 4 cordes qui a fait la renommée des gratteurs de l’archipel. Eux-mêmes musiciens, ils consentent volontiers à jouer quelques morceaux après une visite de l’atelier.

Volcans

Jean-Luc Billet Photographies

Morro de Panela Quente – Santo Antão – Cap Vert – Novembre 2017

Cônes volcaniques, coulées basaltiques, dykes, nappes de cendres, bombes, hyaloclastites, ponces, pouzzolane, … Marcher sur Santo Antão c’est marcher en permanence sur un volcan. En montant vers le col de Forquinha, on évolue dans une vallée fantastique hérissée de dykes; c’est comme une visite à l’intérieur d’un cratère érodé, d’où l’on sort par une étroite faille. Au flanc des volcans de Norte, dans les coupes des falaises de basalte de la côte nord, et dans de nombreux autres endroits de l’île, affleure souvent cette couche de pouzzolane blanche qui recouvrit toute l’île lors d’une éruption il y a 200 000 ans environ. Sur la face sud, désertique, des coulées de lave semblent à peine refroidies et des cônes de volcans parfaits, à peine striés par l’érosion, ne semblent dormir que d’un œil. Suivront-ils l’exemple de Fogo, autre île du Cap Vert, dont le volcan s’est réveillé en avril 95 et obligea les habitants des villages voisins à abandonner leurs maisons?

C’est un pur plaisir d’évoluer dans ces paysages issus du feu terrestre; leur sommeil actuel ne masque pas leur force tellurique. Ce jour-là, le ciel développait des nébulosités mouvementées qui faisaient écho à leurs colères passées.

Sables noirs

Jean-Luc Billet Photographies

Boca de Alto Mira – côte nord de Santo Antão – Cap Vert – Novembre 2017

« Il ne reste plus qu’un village après Corvo, de guingois sur la muraille, puis, la présence humaine s’efface. Le promeneur solitaire chemine avec ses fantômes. Les pluies, le vent, la mer, comme des vautours, ont déchiqueté la carcasse des masses basaltiques abandonnant des sculptures d’idoles, des figures de monarques païens, des faces de lutteurs impavides ou de dieux grimaçants selon Goya. Une ambiance d’Atlantide après le cataclysme. La corniche pavée grimpe et vire, se perd dans des défilés au niveau des sables, remonte caracoler près de la cime de pyramides dont les vagues sapent la base. Un hameau déserté dans une vallée brûlée, Aragna, renforce la toile de la mélancolie. Nous repérons le port de Cruzinhas après des heures d’irréalité capiteuse… »

Jean-Yves Loude – Cap Vert, notes atlantiques.

Et de ce chemin encastré dans les falaises,

un point de vue plongeant sur les vagues atlantiques.

Flux et reflux d’écumes blanches sur fond de sable noir.

(Une autre photo dans le diaporama d’accueil).

L’île-Montagne

Jean-Luc Billet Photographies

São Nicolau vue de Santo Antão – Cap Vert – Novembre 2017

Une île vue d’un sommet d’une autre île. Les deux font partie d’un chapelet volcanique émergé de l’océan au milieu de l’Atlantique, l’archipel du Cap Vert. Parmi elles, Santo Antão, une île-montagne qui culmine à près de 2000m et consent à livrer au marcheur qui sait prendre son temps, les splendeurs de ses replis secrets. Un plateau désertique où l’on peut louvoyer entre les cratères et les cônes des volcans; des canyons colorés qui semblent vierges de toute occupation; des vallées profondes où le moindre espace disponible est cultivé, transformé par ses habitants en jardin d’Eden; et surtout des chemins improbables qui s’accrochent aux pitons, s’installent en vire dans les falaises et montent à l’assaut des murailles qui ferment les vallées. Un régal pour le photographe épris de la beauté des paysages et qui aime varier les points de vue. Une série en préparation qui sera publiée plus tard dans la rubrique « Ailleurs ».